« La 5G est une innovation, mais pas un progrès pour l’homme »

Photo: Le collectif composé d'Annick, Isabelle, Brigitte et Christian. ©  STOP5G Boncourt
Photo: Le collectif composé d'Annick, Isabelle, Brigitte et Christian. ©  STOP5G Boncourt
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BONCOURT. Si les bénéfices des nouvelles technologies de communication sont clairs et mesurables, la question de l’impact de la pollution électromagnétique sur la santé se pose sérieusement. À Boncourt, l’installation prévue d’une antenne 5G inquiète une partie significative des habitants, constitués en association pour adresser une pétition au conseil communal. Interview avec le collectif STOP5G Boncourt.

Comment la pétition a-t-elle été reçue par les autorités communales?

Nous ne le savons pas, car, à ce jour (le 10 novembre 2021, ndlr) et depuis le dépôt des signatures, le 29 octobre 2021, nous n’avons reçu aucune nouvelle des autorités communales. Nous regrettons ce manque de communication et le fait que le conseil communal n’ait pas estimé nécessaire leur présence lors du dépôt des signatures, alors que 348 citoyennes et citoyens ont exprimé, par ce geste, leur désapprobation.

35% de signataires, c’est un gros succès. Est-ce que cela a été plus facile que prévu?

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Certains habitants ont signé spontanément la pétition déposée chez les commerçants, mais c’est vraiment le porte-à-porte qui a été très fructueux. Cette démarche prend beaucoup de temps. Les gens ont souvent besoin d’explications pour pouvoir se faire une opinion. Dans l’ensemble, nous avons été bien accueillis, même par les personnes favorables à la 5G. Ce fût l’occasion de dialogues intéressants et de belles rencontres avec des habitantes et habitants que nous ne connaissions pas forcément. Nous avons aussi pu compter sur l’aide de plusieurs Boncourtoises et Boncourtois pour récolter ces signatures dans leur quartier respectif. Nous les en remercions vivement, grâce à eux, la pétition a pu être menée à bien.

Quelles sont vos inquiétudes liées spécifiquement à la technologie 5G? 

Il faut déjà bien différencier la «5G à bas débit » ou « 4G+ » activée depuis plusieurs mois sur des antennes 3 et 4G et sur les mêmes fréquences (sans permis de construire). Ce qui fait que, votre smartphone vous indique peut être que vous utilisez la «5G». Toutefois, il ne s’agit pas de la « vraie » 5G dite « Fast », qui est une nouvelle technologie avec de nouvelles fréquences.  La  carte des antennes  mentionne de nombreuses antennes «5G», mais le 90% sont des antennes «5G à bas débit» car comme partout en Suisse les installations de la «vraie» 5G (Fast) sont bloquées par les opposants.

La 5G c’est déjà une exposition supplémentaire aux champs électromagnétiques des micro-ondes utilisées par la téléphonie, il n’y a qu’à compter les demandes de permis de construire au Jura pour le réaliser. Cette exposition est nocive pour la biologie, cela est connu et prouvé depuis des décennies par les études indépendantes. Ces champs sont classés par l’OMS (CIRC) dans la catégorie des cancérogènes possibles, avec la particularité que nous sommes exposés à ces champs 24h/24 et 7j/7 contrairement à tous les autres produits de cette liste pour lesquels l’exposition est ponctuelle.

Aussi, pour fonctionner pleinement, la «vraie» 5G a besoin d’une intensité d’exposition beaucoup plus élevée que les valeurs limites actuelles, jusqu’à trois fois plus alors que selon un sondage de l’EPFZ de mai 2021: » deux tiers des Suisses estiment que la population n’est pas suffisamment protégée contre les émissions des antennes de télécommunication mobile (…). 36,3% s’opposent à la 5G, 25,6% sont indécis (…) 

Elle expose plus l’utilisateur et aussi à un nouveau type de signal plus nocif que celui de la 3 et 4G avec un faisceau d’énergie qui est dirigé vers lui en permanence. De nombreux scientifiques s’élèvent contre cette technologie et demande l’application du principe de précaution pour la santé humaine, comme la FMH en Suisse, et aussi pour la faune et la flore.

Enfin, en ces temps d’urgence climatique et de sixième extinction de masse, la 5G ignore les enjeux écologiques actuels. Une antenne 5G peut gérer un million d’objets connectés au km2 et 1 Térabits/s au km2! Selon le Haut Conseil pour le Climat en France (décembre 2020), l’impact de la 5G conduirait à une augmentation de 20 à 50% de l’empreinte carbone du numérique, une augmentation de 3 à 10% du budget carbone pour la production d’énergie et un «impact important sur la consommation d’électricité, entre 5% et 13% de la consommation finale d’électricité du résidentiel et du tertiaire en 2019». L’impact des champs électromagnétiques de téléphonie sur la flore et la faune, en partie les insectes et les abeilles est aussi maintenant établi.

Et puis, finalement avec tous ces risques, elle va nous servir à quoi la 5G? Un débit théorique 3 fois supérieur à celui de la 4G? C’est une innovation technologique, pas un progrès au service de l’homme.

Quel est le lien entre le développement de la fibre optique et le projet d’antenne 5G?

Les antennes de téléphonie sont desservies par de la fibre optique et c’est pour cela que la fibre s’est développée soudain dans les villages… C’est pourtant l’occasion de réaliser des câblages directs vers les maisons et locaux professionnels, comme cela était le cas avec le réseau téléphonique. Malheureusement, les opérateurs privilégient une diffusion aérienne du haut-débit par leurs antennes. Le Canton du Jura n’a pas de plan pour la desserte du territoire en haut-débit, et avec la libéralisation du marché des télécoms, cela dépend uniquement de la volonté des opérateurs. Pourtant la desserte en fibre optique ou en câble coaxial permet un accès haut-débit plus rapide que la 5G, sans rayonnements nocifs pour la santé et la nature, plus sûr en termes de sécurité, et plus respectueux de la liberté individuelle… et la possibilité de réduire l’exposition électromagnétique dans les bâtiments. En effet, 80% des connexions mobiles se réalisent dans les bâtiments.

Des membres du collectif, vous ou d’autres, ont-ils été engagés dans le passé pour lutter contre les antennes 3G ou 4G?

Non.

La pétition est désormais déposée. Quelles sont vos attentes pour la suite?

En l’état actuel et vu le grand nombre de signatures, nous attendons des autorités communales qu’elles respectent les volontés des opposant(e)s, en dénonçant le contrat signé avec Swisscom, en donnant la possibilité à chacune et chacun de pouvoir s’exprimer lors d’une assemblée communale extraordinaire et en favorisant le projet de la fibre optique.

Pensez-vous pouvoir inspirer d’autres communes? Avez-vous déjà eu des contacts en ce sens?

Jusqu’à présent, c’est plutôt nous qui avons été inspirés et guidés par ce qu’il se fait ailleurs, notamment à Alle. Leur collectif, ainsi que la nouvelle Association JURA NON 5G, nous a beaucoup aidés et conseillés dans notre démarche. Nul doute que d’autres s’en inspireront.

Les réponses ci-dessus sont celles reçues par la rédaction.

La Rédaction


Suite à l’interview, le conseil communal de la Commune de Boncourt nous a transmis sa prise de position que nous publions ci-dessous, telle que reçue.

Le conseil communal a été très surpris du contenu de l’article « La 5G est une innovation mais pas un progrès pour l’homme » du Journal l’Ajoie du 18 novembre 2021 tant dans les termes employés par les membres du groupe STOP5G que par l’absence de prise de contact du journal avec les autorités pour entendre sa version des faits.

Constatant que certains éléments erronés avancés par ce groupe de citoyens se répètent via des médias qui se multiplient, le conseil communal estime qu’un communiqué officiel est désormais nécessaire pour, d’une part, rétablir certains faits et d’autre part défendre son crédit :

Le conseil communal a reçu un premier courriel du groupe STOP5G Boncourt le 20 septembre 2021 qui lui demandait une copie du contrat signé avec Swisscom. Il a accusé réception le 23 septembre 2021. Le conseil a ensuite informé le groupe le 6 octobre 2021 qu’il ne transmettrait pas le contrat (protection des données) et lui a proposé une rencontre pour expliquer la position du conseil dans ce dossier. Le groupe a répondu le 11 octobre 2021 qu’il remerciait de la réponse et que les membres allaient se consulter pour proposer des dates. En date du 12 octobre 2021, le groupe a demandé un rendez-vous au conseil afin de déposer les signatures de la pétition STOP5G, en proposant le jeudi 21 octobre 2021. Le 18 octobre 2021, le conseil répondait que les membres du conseil communal souhaitaient rencontrer les membres du groupe avant le dépôt de leur pétition mais qu’ils restaient à disposition pour une entrevue ultérieurement ; le conseil informait également que le groupe était libre de déposer en tout temps sa pétition au secrétariat communal. Le conseil souhaitait échanger avant le dépôt de la pétition car il y avait manifestement plusieurs incompréhensions majeures concernant l’objet traité en assemblée du 17 juin 2021 et plus largement de la thématique de la 5G. Ces incompréhensions ont été constatées notamment dans le flyer que le groupe a distribué dans le village à mi-septembre.

Le 19 octobre 2021, le groupe proposait trois dates au conseil pour une rencontre. Ces dates ont été soumises aux membres du conseil lors de la séance du 20 octobre 2021. Avant de fixer une date, les membres du conseil ont souhaité que des compléments d’information soient requis auprès de l’Office fédéral des communications et des instances cantonales. Dans l’intervalle, le groupe STOP5G a déposé sa pétition le 29 octobre 2021.

Partant, le conseil a regretté que le groupe STOP5G Boncourt n’ait pas attendu la réponse du conseil et l’entrevue proposée n’avait alors plus beaucoup de sens dans la perspective de rétablir les faits, corriger les incompréhensions et entendre les motivations.

Le conseil informe la population qu’il a pris la décision, suite au dépôt de la pétition en date du 29 octobre 2021, de répondre personnellement à l’entier des signataires de la pétition par un courrier qui reprend les points principaux d’incompréhensions en rétablissant des faits. Ce courrier sera envoyé dès réception des informations demandées à la Confédération.

Enfin, le conseil communal est déçu qu’on l’accuse de manque de communication alors même qu’il avait également pris l’initiative de communiquer au sujet de la location d’un terrain pour la pose d’une antenne de téléphonie mobile lors de l’assemblée du 17 juin 2021. Il l’avait fait dans un esprit de grande transparence (car aucune obligation légale n’est nécessaire pour cela) par rapport à un sujet qu’il savait sensible au vu des réactions constatées ailleurs dans la région ou ailleurs en Suisse.

Le conseil communal est bien sûr favorable à ce que les avis puissent être exprimés sur tous les sujets. Il s’agit du débat public et il est très important qu’il ait lieu. En revanche, Il faut bien comprendre que dans le système politique suisse, certaines décisions sont légitimement prises au niveau fédéral, cantonal ou communal. Le conseil communal, par son activité régulière de la politique locale, dispose d’une certaine expérience et, s’il n’est bien-sûr pas sans failles, agit et souhaite continuer de le faire comme un partenaire des citoyennes et citoyens et non un opposant.

Des agissements comme celui du groupe STOP5G ne sont, à notre avis, pas constructifs et au contraire, font gaspiller une énergie et un temps précieux à l’administration et au conseil communal alors que des pistes pour faire entendre leur voix là où elle doit être acheminée auraient très bien pu être trouvées lors d’une entrevue avant dépôt de la pétition.

Boncourt le 18.11.2021

Le conseil communal

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