BONCOURT Que faire des 70 000 mètres carrés laissés vacants par la multinationale BAT (British American Tobacco), qui quitte le village frontalier? Le député jurassien du Centre Gauthier Corbat a déposé une question écrite adressée au Gouvernement jurassien, il s’interroge: pourquoi ne pas transformer le site en ports francs? Explications.
Que vont devenir les locaux de BAT à Boncourt? La question a été discutée au sein de l’exécutif jurassien. Et pour cause: le député Gauthier Corbat a déposé une question écrite quant à la future vocation de l’immense surface – sept hectares – qui sera libérée, une fois parti le cigarettier à la fin de l’année. L’élu a avancé une piste inédite: créer une vaste zone de stockage non soumise aux taxes. Autrement dit, un centre de ports francs, permettant à des marchandises de transiter, sans être soumises aux droits de douane et à la TVA. De quoi entreposer des œuvres d’art, des bijoux, des pièces d’horlogerie, des grands crus et autres biens de valeur… Il s’agirait d’une première dans le Jura.
Des retombées économiques
La Suisse compte, à ce jour, une dizaine de ports francs qui rapportent des millions aux collectivités publiques. À titre d’exemple, Gauthier Corbat cite le leader en la matière: Genève, avec une surface de plus de 100 000 m2. Plus d’un million d’œuvres d’art se trouvent dans ce coffre-fort géant, ce qui en fait de facto le plus grand musée au monde! Pour le canton de Genève, les gains tirés de ces entrepôts ultra-sécurisés sont estimés entre 10 et 12 millions de francs par an. Certes, Boncourt n’est pas Genève, mais «il y a certainement une carte à jouer dans l’arc jurassien», selon Gauthier Corbat qui estime que le village de 1217 habitants (OFSP, 2019) est idéalement situé, à la frontière franco-suisse, tout en étant proche de l’Allemagne, de Bâle et de l’EuroAirport. Le site de BAT en lui-même présenterait toutes les caractéristiques requises: «Les volumes sont importants, tant au sol qu’en hauteur. Transformer ce site en plateforme logistique serait envisageable, à condition d’investir bien sûr. Mais l’essentiel est là, notamment les accès: les camions peuvent aller et venir facilement.»
Une opportunité à saisir pour le canton?
Avec le départ de BAT, Boncourt s’apprête à devenir la plus grande friche du canton du Jura… L’idée est de valoriser au mieux cette surface disponible, avant qu’elle ne vienne s’ajouter à la liste des sites à l’abandon. Un sujet qui intéresse particulièrement Gauthier Corbat: «Je suis préoccupé par les centaines de milliers de mètres carrés dont on ne fait rien. D’ailleurs, j’ai fait passer une motion sur les friches industrielles en décembre dernier, au Parlement. Il faut favoriser les bâtiments existants qui ont des qualités architecturales plutôt que de construire des bâtiments sans âme dans nos périphéries», explique l’élu qui dénonce le mitage du territoire.
Que répond le gouvernement jurassien à cette suggestion? Celui-ci ne souhaite pas s’engager à ce stade et rappelle qu’il incombe à l’entreprise BAT de trouver un acheteur pour ses locaux. Les autorités soulignent également que la possibilité de transformer le site en ports francs devrait faire l’objet d’une étude préalable pour déterminer la viabilité économique de ce projet, celle-ci devant être réalisée par le secteur privé. L’exécutif cantonal n’exclut pas, en revanche, de soutenir le projet dans un second temps s’il est viable, via les instruments de promotion économique.
Caroline Libbrecht